lundi 21 mai 2012

Yppah - Eighty One (2012)




Yppah. Six ans déjà qu’on se délectait de ce talent précoce, parvenu à nos oreilles par la grâce de You Are Beautiful At All Times (2004). Un premier album bâti comme une odyssée sonore, osée et saisissante, quelque part entre les invétérés My Bloody Valentine et le hip-hop samplé de DJ Shadow  sur Endtroducing (1996). Même architecture, en plus rock, sur They Know What Ghost Know (2009), aux fondations solides confirmées trois ans plus tôt. Et puis, Joe Corrales Jr. a décidé, sans prévenir, de chercher l’inspiration à Galveston, sur la côte du golfe du Texas, pour composer Eighty One. Le titre, référence à l’année de naissance du bonhomme, pourrait tout aussi bien indiquer en mètres la chute subie par l’auditeur à l’écoute de ce troisième effort. Tout ce qui faisait l’authenticité et la force d’un artiste de cette trempe s’est subitement évaporé dans les limbes de l’Atlantique. Yppah, conscient d’avoir pris du galon grâce à ces précédentes compositions, gagne ici en immédiateté ce qu’il perd en profondeur. Aucun titre de l’album ne permet de se raccrocher aux contours crépusculaires et fouillés d’anciens morceaux comme I’ll Hit The Breaks ou The Subtitles That Count.  Les sonorités se font plus frappantes, plus sophistiquées que par le passé mais sentent plus le plaqué que la terre sèche. Truffée de samples et de boucles hip-hop, la production froide comme de la glace masque la véritable patte de Corrales et sa mélancolie inspirée.  Si Never Mess With Sunday ou Paper Knife parviennent à séduire, le côté fourre-tout et les moments parasités par des effets creux (R. Mullen) dominent. Evoquons à peine la présence de la chanteuse Anomie Belle, qui plombe un morceau à chaque fois qu’elle y pose sa voix. La virtuosité de Yppah n’est pas remise en cause ni entamée, elle se fait juste cruellement attendre tout au long de ce vertigineux saut dans le vide.  

4/10

(Ninja Tune/PIAS)

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