samedi 21 juillet 2012

Saint Motel - Voyeur (2012)



Sur un malentendu, ça aurait pu marcher. Voyeur aurait pu prétendre au titre d'album de l'année, tant il en comporte tous les contours. A un détail près, il sera retenu comme étant l'un des pires. La frontière est fine entre l'excellence et le ragoût, la créativité et le pastiche. Premier effort de cette formation, l'album est un carnage abyssal, de ceux qui donnent envie de s'amputer l'oreille avec une paire de ciseaux pour gaucher. 

Abominable de bout en bout, on ne sait plus à quel saint se vouer pour écouter ce disque sans des envies de meurtre. Il y a pourtant deux moyens de sortir à peu près indemne de ce supplice au long cours : s'injecter quatre grammes d'acide sulfurique dans la veine ou être sourd. N'ayant testé ni l'une ni l'autre de ces solutions, la peine est colossale. Et le gâchis incommensurable. Car A/J Jackson et sa bande ne manquent pas de bonnes idées : des cuivres, des riffs efficaces, des mélodies tenaces. Mais, en prenant par les rênes tous les clichés de la musique indé depuis vingt ans, ils aboutissent à une œuvre morne, horripilante et sans une once de vie. Si à la première écoute, Voyeur accroche l'oreille, il broie le cerveau dès la deuxième. Le titre est explicite : le groupe donne l'impression d'être dans un motel au bord de la Route 66 et d'épier les génies par le trou de la serrure : sauf que la nuit tombée, ces illustres artistes sombrent dans la déchéance, s'oublient à eux-mêmes, alors que Saint Motel croit naïvement qu'ils composent leurs œuvres. 

Une telle maladresse et un si grand mépris pour l'auditeur ont de quoi élever les One Direction au rang de pionniers de la pop music. La partie de guitare sur l'introductive Feed Me Now et ce chant singeant Morrissey, tandis que se pointent des trompettes que même la féria nîmoise aurait refusées, se donnent un genre de samba tropicale pour l'été. Il n'en est rien. Voyeur est le meilleur moyen qui soit pour sortir de chez soi et fuir, à la recherche d'un sacro-saint silence existentiel. Les envolées lyriques sur Puzzle Pieces trahissent un confondant manque d'inspiration. Ce n'est parce qu'on ouvre sa bouche qu'on a quelque chose d'intéressant à dire. Ne nous penchons même pas sur le vide sidéral contenu dans les textes : le masochisme a ses limites. Muse doit l'avoir mauvaise : ils ne sont plus maîtres dans leur royaume du mauvais goût assumé, sauf qu'eux au moins le savent et assurent sur scène. 

Ne soyons pas trop durs : Voyeur a le mérite d'être constant dans la médiocrité et le single 1997 n'est tout de même pas désagréable. Ils n'ont que quinze ans de retard, c'est large. At Least I Have Nothing, peut-on écouter sur le disque : comme quoi, ils n'ont pas perdu toute leur lucidité. Saint mortel, priez pour eux.

0.5/10

(On the Records/Import)

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