dimanche 9 septembre 2012

The XX - Coexist (2012)



La brise est bien fraîche, ce matin. Les nuages flottent dans l'air et le soleil n'est pas près d'apparaître. Le vent quant à lui secoue à lui seul cette nuit passée à coexister auprès des valeureux The XX. Où nous étions-nous perdus de vue ? Je ne peux m'en souvenir. Une nuit aura-t-elle suffi ? Plutôt l'éternité. Annoncé comme le messie, ce nouvel album était censé faire apparaître l'évidence : après une production éponyme sépulcrale et galaxique, les Anglais devaient mettre tous les mondes à l'unisson en allant encore plus loin, en confirmant l'essai avec un second disque inattaquable.

Il n'en est rien.

Plus qu'une déception, Coexist est surtout un beau regret. Qu'ont fait Jamie, Oliver et Romy depuis l'école maternelle, là où tout a commencé ? Beaucoup de choses. On les imagine trop bien mis sur le banc de touche lors du match de foot de la récré, là où les grands cons ont pignon sur rue. Pendant ce temps-là, nul doute qu'ils se sont réfugié dans la rêverie, en tripatouillant leur instrument tel un fétichisme suranné. Souhaiter telle enfance à The XX est chose saine. Ceux-ci ont dû souffrir pour accoucher d'une oeuvre si forte, si indolente et si fracassante que leur premier album. La claque fut d'autant plus belle qu'elle fut inattendue, un peu comme le Funeral d'Arcade Fire qui nous a fait passé la fin 2004 (déjà...) pour le plus lumineux moment depuis des lustres. 

Tergiverser ne sert qu'à fuir. Or le constat est accablant. The XX est un groupe paresseux. A peine vingt ans dans les pattes et déjà à se répéter. L'effet de surprise a disparu, mais pas seulement. C'est toute la dynamique d'un groupe peu sûr de soi, enclin au sombre mais capable de s'élever comme jamais, qui a disparu. Au-delà de la qualité intrinsèque de ses compositions, Coexist demeure d'un bancal affriolant. Plus de dynamique, trop dans le contrôle de soi, l'envie de parfaire leur parfait premier album : tout cela n'est pas digne d'une belle adolescence. The XX a grandi trop vite, s'imprégnant des codes du monde indé et apprenant bien plus vite que ses pairs. Résultat : des concerts assis à 50 euros l'heure. Le genre de live promo dont on se serait bien passé. Mais passons, car cette digression n'est là que pour repousser le moment fatidique du jugement.


Le groupe, et plus particulièrement Oliver Sim, a produit un phénoménal travail sur les voix. Un artiste sans voix est un artiste sans identité. A ce jeu-là, dégainons tout de suite nos plus belles armes : Missing, morceau d'une redoutable efficacité, nous offre des choeurs constellaires à renverser un empire sur le seul timbre d'une voix. Le titre est somptueux, les arrangements sont délicats et le flow groovy semble nouveau, en tout cas fort appréciable. Suit alors la non moins magique Tides, apeurée et désemparée et toujours ce rythme si accrocheur. Voilà, le problème est là. Lorsqu'on en vient à parler de rythme chez The XX c'est que toute la dimension onirique de leur musique a disparu. Coexist est un album de crise, froid et convenu, plaisant à l'écoute, certes, mais notre cerveau demeure intact. Doté d'une cohésion qui fait défaut (sic), ce second opus ne repose que sur une seule jambe, terriblement claudiquant et sans aucune dynamique. Aucun titre n'est foncièrement mauvais (quoique Fiction confine au poussiéreux) mais c'est cette cohésion et cette envolée vers les astres que nous permettait XX qui n'est désormais plus possible ni même envisagée : que viennent foutre sur un album de dix titres Unfold, improbable parodie d'un groupe qui se singe, Angels, pas mauvaise mais d'une convenance assez méchante, et Swept Away, où les guitares cristallines deviennent tellement usées qu'elles nous font l'effet d'une gourmandise trop sucrée ? Comble absolu, Coexist ne s'en sort qu'en évaluant ces titres indépendamment les uns des autres. Plus d'atmosphère, plus de voyage dans le temps ni dans l'espace. C'est franchement triste, au bout de trois ans de carrière et deux productions : l'une excellente, l'autre vilipendante. 

On se consolera en gardant à l'esprit les sublimes et incantatoires Chained et Try, dont le flow et la dextérité des voix, apparus avant l'écoute de l'album pour la première, nous avait fait croire à l'inespéré. The XX fomente sa voie comme un bûcheron tente de couper du bois dans un désert aride et amnésique. 

7/10

(XL Recordings)



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